Écho-Festival 2024
Réflexions et questionnements
à propos des
éco-résistances
Cette chronique autour du thème de l'éco-festival 2024 comporte deux parties.
· Dans cette première partie, nous allons chercher à cerner les limites de ce qui peut renvoyer aux éco-résistances. Nous verrons que les éco-résistance visent à protéger la nature, les écosystèmes et le vivant au sens large contre des décisions politiques ou économiques qui engendrent la destruction de l’environnement.
· Dans la
deuxième partie, nous explorerons le domaine de la santé, pour savoir comment les
résistances sanitaires comme celles des années COVID entrent dans le champ
des
éco-résistances. La logique de cette réflexion tient au fait que l’Homme appartient à la
fois à la nature et au vivant. Si sa santé est menacée, les actes de
résistance pour la protéger entre bien dans le champ des
éco-résistances.
Question 1 :
Dans un éco-festival sur le thème des "éco-résistances" comment définir la meilleure façon de s'opposer et "résister" aux décisions politiques qui entrainent des destructions de la nature et du vivant ?
Développement :
Pour un éco-festival sur le thème des éco-résistances, il est important de proposer des réflexions à la fois engageantes et diversifiées pour aborder différentes facettes de la résistance écologique face aux décisions politiques. Voici une liste de thèmes potentiels à proposer, couvrant des perspectives à la fois locales, globales, pratiques et philosophiques :
1. Désobéissance civile et action directe non-violente
· Question clé : Quelles sont les limites et l'efficacité de la désobéissance civile ?
· Sous-thèmes :
· Stratégies historiques (Gandhi, Martin Luther King) et leur pertinence dans les luttes écologiques contemporaines.
· Cas concrets : Extinction Rebellion, ANV-COP21, les ZAD (Zones À Défendre).
· Les risques juridiques et politiques : criminalisation des militants écologistes.
2. Lobbying citoyen et plaidoyer environnemental
· Question clé : Le lobbying citoyen est-il suffisant pour infléchir les décisions politiques destructrices de l’environnement ?
· Sous-thèmes :
· Comment les citoyens peuvent s'organiser pour influencer les politiques environnementales ?
· Exemples de campagnes réussies (interdiction des néonicotinoïdes, protection d'espèces menacées, etc.).
· L’éco-fiscalité et le plaidoyer pour des politiques vertes (taxe carbone, subventions aux énergies renouvelables).
3. Résistance juridique : le droit au service de la nature
· Question clé : Le cadre juridique est-il un outil de résistance écologique efficace ?
· Sous-thèmes :
La reconnaissance des "droits de la nature ➤ La création d’une personnalité juridique pour des éléments naturels est la partie émergée d’un iceberg qui appréhende la transition écologique d’une manière systémique et transversale, la jurisprudence de la Terre. L’objectif est de changer la manière dont le droit appréhende la Nature pour mieux la protéger." (ex. : le fleuve Whanganui en Nouvelle-Zélande, l'Amazonie, le droit des fleuves…).
· Actions en justice contre les multinationales et les États : l'affaire de l'Affaire du Siècle en France.
· L’impact des procès climatiques internationaux : de l’accord de Paris à la Cour européenne des droits de l'homme.
4. Résilience locale et autonomisation des communautés
· Question clé : Comment renforcer les capacités locales face aux impacts de la destruction de la nature ?
· Sous-thèmes :
· Le rôle des communautés locales dans la gestion durable des écosystèmes.
· Modèles de résistance par l’autonomie énergétique, alimentaire et technologique.
· Éco-villages, permaculture, et autres pratiques communautaires résilientes.
5. Le rôle des médias et des réseaux sociaux dans la résistance écologique
· Question clé : Comment les médias alternatifs et les réseaux sociaux peuvent-ils soutenir l’éco-résistance ?
· Sous-thèmes :
· Lutte contre la désinformation des médias traditionnels et l'influence des lobbies industriels.
· Campagnes de sensibilisation virales sur les réseaux sociaux : succès et limites.
· Cybermilitantisme : hackers écolos et actions numériques.
6. Art et résistance écologique : le rôle de la culture dans la défense de l’environnement
· Question clé : Comment l’art peut-il inspirer et mobiliser pour des causes écologiques ?
· Sous-thèmes :
· Street art, performances et installations éphémères pour dénoncer la destruction environnementale.
· Le pouvoir des récits et de la fiction dans la prise de conscience écologique (éco-fictions, films militants, musique engagée).
· Initiatives d'artivisme : artistes et activistes main dans la main pour créer des mouvements de fond.
7. Éco-féminisme et justice climatique
· Question clé : En quoi le mouvement écoféministe propose-t-il une approche radicale et holistique de la résistance écologique ?
· Sous-thèmes :
· Le lien entre l'oppression des femmes et la destruction de la nature.
· L’impact différencié des crises écologiques sur les femmes et les populations marginalisées.
· Leadership féminin dans les luttes pour la protection de la terre et des ressources naturelles.
8. Technologies vertes : alliées ou ennemies de la résistance écologique ?
· Question clé : La technologie peut-elle réellement être une solution aux crises écologiques ou risque-t-elle de renforcer l’exploitation du vivant ?
· Sous-thèmes :
· Les solutions technologiques pour (tenter de) réduire les émissions de CO₂ (énergie solaire, éolienne, capture du carbone).
· Les critiques du "solutionnisme technologique" : quelles alternatives "low-tech" ?
· La question des métaux rares et la face cachée de la transition numérique.
9. Agriculture industrielle vs agroécologie : résistance par les pratiques agricoles.
· Question clé : L’agriculture agro-industrielle est-elle compatible avec la lutte contre la destruction de la nature ?
· Sous-thèmes :
· Alternatives à l’agriculture intensive : agroforesterie, permaculture, biodynamie.
· Le rôle des petits producteurs dans la transition écologique.
· Résistance au modèle agrochimique et aux OGM : quel avenir pour les semences libres ?
10. Décoloniser la protection de la nature : luttes des peuples autochtones
· Question clé : Quelles leçons tirer des luttes des peuples autochtones pour la protection des territoires et de la biodiversité ?
· Sous-thèmes :
· Alliances avec les peuples autochtones dans la résistance à l'extractivisme et la déforestation (Amazonie, Afrique, Asie).
· Le rôle des savoirs traditionnels dans la préservation des écosystèmes.
· Les enjeux de justice environnementale et de reconnaissance des droits autochtones.
11. Écologie et décroissance : refuser le modèle de la croissance infinie
· Question clé : La décroissance est-elle une utopie ou une nécessité pour sauver le vivant ?
· Sous-thèmes :
· Critique du capitalisme vert et de la croissance verte.
· Modèles économiques alternatifs : sobriété heureuse, économie circulaire, et post-croissance.
· La décroissance comme résistance au consumérisme et à l’extractivisme globalisé.
12. La biodiversité en péril : restaurer et protéger la vie sauvage
· Question clé : Comment restaurer la biodiversité face à la dégradation accélérée des écosystèmes ?
· Sous-thèmes :
· Projets de réensauvagement et préservation d’espèces en danger (loup, lynx, ours, etc.).
· Lutte contre la déforestation et la destruction des habitats naturels.
· Enjeux de la protection des océans et des récifs coralliens : initiatives locales et internationales.
Ces thèmes sont conçus pour stimuler la réflexion, inviter à l’action et
offrir une variété de points de vue sur la manière de "résister" à la
dégradation de l’environnement, que ce soit par l’action directe, la
transformation des mentalités, ou l’innovation sociale et juridique.
Question 2 :
Dans le cadre de cette réflexion, quel pourrait être la part de la
"résistance", et celle de la résilience ?
En précisant les points sur lesquels se situe la résistance, et ceux qui
relèvent de la résilience?
Développement :
La réflexion autour de l'éco-résistance et de la résilience peut être articulée en distinguant leurs objectifs, leurs stratégies et leurs temporalités, tout en les percevant comme complémentaires. Voici comment les deux notions peuvent s'articuler dans le cadre d'un éco-festival, en proposant des points de réflexion pour comprendre où elles se croisent et se différencient.
1. La résistance : un acte de confrontation immédiate
· Objectif principal : La résistance vise à stopper ou contrecarrer des actions ou des décisions qui entraînent des destructions du vivant, souvent par des moyens de confrontation directe (physique, juridique, politique).
· Caractéristiques :
· Réaction immédiate : La résistance est souvent une réponse urgente à des menaces spécifiques (projets de construction, lois favorisant l'exploitation des ressources naturelles, etc.).
· Confrontation : Elle peut prendre la forme de désobéissance civile, d'actions militantes, de procès, de blocages de projets industriels ou politiques.
· Objectifs à court terme : Arrêter des pratiques nuisibles ou retarder des processus destructeurs (comme des travaux de déforestation, des projets de pipeline, etc.).
· Exemples :
· Occupation de zones menacées (ZAD, actions contre des projets autoroutiers ou de grands barrages).
· Manifestations, grèves climatiques, blocages d’infrastructures fossiles.
· Poursuites juridiques contre des entreprises responsables de pollutions environnementales.
2. La résilience : un acte de construction à long terme
· Objectif principal : La résilience cherche à renforcer la capacité d'une société ou d'un écosystème à s'adapter et à surmonter les crises environnementales, tout en maintenant ses structures fondamentales.
· Caractéristiques :
· Anticipation : La résilience concerne les moyens de préparer les individus, les communautés et les écosystèmes à absorber les chocs environnementaux, sociaux ou économiques à venir.
· Adaptation : Plutôt que de lutter contre des projets destructeurs spécifiques, elle consiste à créer des systèmes qui peuvent survivre à ces bouleversements (par exemple, la création de réseaux alimentaires locaux, la gestion communautaire des ressources).
· Objectifs à long terme : Construire des alternatives durables et des structures capables de résister aux crises futures.
· Exemples :
· Développement de pratiques agroécologiques pour créer des systèmes agricoles durables.
· Renforcement de communautés locales à travers des réseaux d’autonomie énergétique ou alimentaire (jardins partagés, coopératives).
· Construction d’infrastructures résistantes aux catastrophes climatiques (inondations, sécheresses).
3. Points de convergence entre résistance et résilience
Bien que leurs stratégies diffèrent, la résistance et la résilience
se rejoignent sur plusieurs points fondamentaux :
· Préservation du vivant : Les deux visent à protéger la biodiversité, les écosystèmes et les communautés humaines contre les conséquences dévastatrices de certaines décisions économiques ou politiques.
· Engagement citoyen : Que ce soit pour résister ou pour renforcer la résilience, l'engagement citoyen est central. Cela se manifeste par des actions collectives, des prises de conscience partagées et des mouvements sociaux.
· Construction d'alternatives : La résistance peut également mener à des actions résilientes. Par exemple, la défense d'une forêt contre un projet destructeur peut donner naissance à une gestion communautaire de cet espace, assurant ainsi sa durabilité.
4. Points où la résistance et la résilience se distinguent
Dimension |
Résistance |
Résilience |
Temporalité |
Court terme, urgence d'une situation |
Long terme, anticipation des crises futures |
Mode d'action |
Confrontation, blocage, désobéissance civile |
Adaptation, réorganisation, reconstruction |
Exemples d'objectifs |
Stopper une loi destructrice, empêcher un projet industriel |
Créer des systèmes agroécologiques locaux, promouvoir l’autonomie énergétique |
Attitude face au pouvoir |
S'oppose directement au pouvoir en place |
Crée des alternatives parallèles au pouvoir existant |
Nature des actions |
Souvent radicale, visible, choquante |
Discrète, continue, réorganisatrice |
5. Exemples concrets illustrant la complémentarité
· Le cas des ZAD (Zones À Défendre) :
Les ZAD illustrent à la fois la résistance et la résilience. D'abord, les
militants s'opposent activement à des projets jugés destructeurs, par
exemple la construction d'un aéroport, d’un pont ou d'une autoroute.
Ensuite, ils mettent en place des systèmes alternatifs de vie durable dans
ces mêmes zones, promouvant des pratiques agricoles ou énergétiques
résilientes. C’est à la fois une confrontation au modèle existant et une
construction d’un modèle de vie alternatif.
· La lutte contre les bouleversements environnementaux et/ou climatiques
:
La résistance se manifeste à travers les marches pour l’environnement, les
actions contre les entreprises fossiles ou les gouvernements qui ne
respectent pas les accords environnementaux. Cependant, dans le même
temps, des mouvements de résilience émergent, cherchant à créer des villes
plus résilientes (comme les initiatives de "villes en transition"),
promouvant la sobriété énergétique, l’adaptation des infrastructures
urbaines ou la régénération des sols.
6. Questions à débattre sur la complémentarité de la résistance et
de la résilience
Voici quelques questions à soulever lors du festival pour explorer cette
relation :
· Peut-on être à la fois dans la résistance et la résilience ?
Par exemple, comment un mouvement peut-il bloquer un projet industriel
tout en construisant des alternatives locales durables ?
· Quand la résistance est-elle nécessaire et quand faut-il privilégier la
résilience ?
Quels contextes ou situations requièrent une confrontation directe et
immédiate, et lesquels nécessitent une préparation à long terme ?
· Quels sont les échecs et succès des stratégies de résistance versus de
résilience ?
Quels mouvements écologistes ont échoué en se concentrant uniquement sur
la résistance ou sur la résilience, et pourquoi ?
· Comment résister à l'effondrement tout en construisant une société
résiliente ?
Comment articuler la résistance aux logiques destructrices (croissance,
extractivisme) avec la construction d’un avenir post-croissance résilient
?
En conclusion :
La résistance et la résilience sont deux volets indissociables d'une stratégie de défense du vivant.
La première est souvent la réponse à une menace immédiate, tandis que la seconde prépare à long terme des sociétés capables de s'adapter et de prospérer dans des conditions nouvelles.
Les débats pourraient souligner la manière dont ces deux approches peuvent non seulement coexister, mais s’enrichir mutuellement.
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